La souscription de SCPI à crédit reste-t-elle pertinente ?
Plusieurs types d’offres sont possibles en matière de financement de SCPI, marché qui a connu une nouvelle impulsion après la fin des activités du Crédit Foncier.
La SCPI avec effet de levier reste-t-elle un placement intéressant, en dépit de la crise du coronavirus et des interrogations – légitimes – sur l’environnement économique de ce type de placement ? « On note un engouement très fort pour les SCPI à crédit depuis quelques années, et celui-ci est resté intact malgré la crise », explique Jérémy Schorr, directeur commercial du portail Primaliance. Et pour cause, « c’est l’un des rares produits où l’on peut aisément faire jouer l’effet de levier », selon Julien Ribes, fondateur de MySCPI.com. En résumé, il s’agit de faire coïncider les conditions favorables du crédit avec celles des SCPI. De fait, l’écart entre le taux de rendement servi par les SCPI de rendement, à 4,4 % en moyenne sur 2019, et le taux de financement habituellement constaté de 1,9 % assurance incluse pour un emprunt sur 20 ans, est « clairement avantageux », analyse la société d’investissement immobilier Stellium Placement. Fiscalement, l’investisseur s’y retrouve aussi compte tenu de l’imputation possible des intérêts d’emprunts et de l’assurance décès-invalidité sur les revenus fonciers.
De nouveaux circuit après la disparition du Crédit Foncier
Il faut cependant savoir que le paysage du financement des SCPI a évolué dernièrement. Le marché était traditionnellement trusté par le Crédit Foncier, dont la disparition l’an dernier et le regroupement des activités au sein du groupe BPCE a semé le doute sur l’avenir de la distribution de SCPI à crédit. « En réalité, la fin du Crédit Foncier n’a pas tué le marché, mais mis un terme au modèle traditionnel de rémunération pour les conseillers en gestion de patrimoine (CGP) », explique Julien Ribes. Et aujourd’hui, loin d’avoir disparu, le financement s’effectue via deux grands types de circuits, que ce soit en passant par un CGP, une plateforme ou en direct.
Offres « packagées » ou « sur-mesure »
En premier lieu, on retrouve des offres « packagées », qui tournent autour de deux grands acteurs – Primonial et Crédit Agricole Consumer Finance (CACF) – lesquels donnent accès à une douzaine voire une quinzaine de SCPI. Particularités : les taux sont souvent un peu élevés – 2,5 % sur 25 ans, dans l’une des offres (soit environ le double d’un crédit immobilier classique actuellement). L’autre offre est concentrée entre une petite dizaine de banques de réseaux traditionnels. Davantage « sur-mesure », ce type de distribution peut donner accès à un plus large panel de SCPI, et à des conditions de crédit parfois plus favorables. « Dans ce type de solution, tout dépend du profil de l’investisseur : est-il propriétaire ou non ? Quels sont ses revenus ? Mais en général les conditions sont souvent plus attractives », selon Jérémy Schorr. Attention, un certain nombre de concessions sont souvent demandées. « Pour les banques, c’est un outil de conquête de nouveau clients, avec à la clé ouverture de compte, livret, domiciliation bancaire… », analyse Julien Ribes.
Un financement qui se réalisera en… 2021
Faut-il se lancer actuellement, alors que les conditions de crédit semblent s’engager vers un durcissement ? Pour le moment, les taux restent historiquement bas, selon les spécialistes. Mais d’autres aspects sont à prendre en considération. « Il faut le faire si on peut le faire, compte tenu de son âge, de ses objectifs, de son horizon de placement, estime-t-on chez Primaliance. Mais il est important de garder à l’esprit qu’un investisseur qui se lance aujourd’hui ne verra son placement se concrétiser qu’en 2021 : il faut compter 1 à 2 mois pour sortir le financement, et 6 mois pour le délai de jouissance des parts. Soit probablement après le choc de la baisse des rendements ».
Plus globalement, des interrogations demeurent quant au marché de la SCPI dans son ensemble. « Il est indispensable aujourd’hui d’être très sélectif dans le choix des SCPI. Mais avec des rendements attendus autour de 4 % cette année, cela reste l’un des meilleurs placements », estime Jérémy Schorr. « 2020 ne sera pas la meilleure année pour les SCPI mais le vrai enjeu, c’est le degré de solidité des locataires au moyen-long terme, dans un secteur encore majoritairement tourné vers le bureau, nuance Julien Ribes, pour qui néanmoins, « il est permis d’être confiant au regard de la rapidité de réaction des banques centrales face à la crise ».
Versements programmés
Pour les plus réticents à l’endettement, une autre stratégie se développe parallèlement au développement de l’offre à crédit : les versements programmés, qui permettent à l’épargnant d’avoir la main sur la périodicité des versements, et de les cesser à tout moment. Prônée par certains spécialistes, la pratique n’est pas toujours conseillée par tous. « L’investissement est lissé dans le temps, ce qui est surtout pratiqué dans les marchés financiers, mais je vois moins l’intérêt sur le marché des SCPI, surtout dans un environnement baissier. Ce type d’investissement peut aussi être source de complications fiscales lors du calcul des plus-values taxables avec le système d’abattements », analyse un CGP. Il n’en demeure pas moins que l’offre se développe, et qu’il devient possible d’effectuer des versements programmés en démembrement dans la SCPI.